Le 29 Poissonniers a ouvert en novembre après dix mois de travaux. Intégralement rénové, il offre aujourd’hui 33 chambres dans lesquelles 87 personnes (29 familles) résident. Fort de l’expérience qu’il a acquise lors d’une première opération il y a deux ans, son propriétaire a acquis il y a un an ce nouvel hôtel, qui répond pleinement aux attentes du Samusocial de Paris en termes d’accueil des familles : chambres confortables et adaptées à la composition familiale, espaces collectifs pour cuisiner et se réunir pour des activités, espace buanderie, espace de rangement des poussettes...
Explication du projet par son propriétaire.
Comment êtes-vous arrivé sur le secteur de l’hôtellerie sociale ?
Un peu par hasard, il y a deux ans, à l’occasion du rachat d’un hôtel à Bastille. Mon projet était de convertir cet hôtel dédié à l’hôtellerie sociale en hôtel de tourisme. Quinze jours après l’achat, l’hôtel a dû fermer pour des problèmes de normes. Nous avons envisagé de faire les travaux en milieu occupé mais nous nous sommes heurtés à des plaintes des familles. L’hôtel a donc été évacué. C’est à cette occasion que nous avons eu à travailler avec le CASVP et le SSP. J’avoue que j’étais au départ réticent à me lancer dans le social. Je connaissais mal ce secteur et je n’en avais pas une bonne image. Et puis au fil du projet, j’ai appris à mieux comprendre le travail, à en connaître les attentes. Il s’agit d’un métier en plein bouleversement, avec aujourd’hui des cahiers des charges contraignants mais clairs.
Comment avez-vous travaillé sur le projet du 29 Poissonniers ?
En partenariat avec le SSP afin que l’hôtel réponde aux nouvelles conditions d’hébergement que le GIP entend avoir pour les familles, à savoir notamment la mise à disposition d’espaces pour cuisiner, de mener des activités, et laver son linge. Nous avons travaillé avec le même architecte que pour le premier hôtel à Bastille. Celui-ci connaît désormais bien les contraintes, même si chaque projet est forcément différent compte tenu des possibilités qu’offre le bâti. Au 29 Poissonniers par exemple, nous avions la chance, pour les espaces communs, de pouvoir réhabiliter le sous-sol.
Comment les familles se sont-elles approprié le lieu ?
Elles ont emménagé en novembre. Pour le moment tout se passe bien. Les familles sont très calmes et respectent le lieu. Nous avons remarqué à Bastille qu’en maintenant le lieu en bon état, les familles avaient tendance à moins le dégrader; cela implique quelques petites travaux réguliers. Elles se servent de la cuisine collective pour cuisiner, mais pas de l’espace collectif pour prendre le repas qu’elles préfèrent prendre dans leur chambre. Le local à poussettes permet que le lieu reste en ordre. Nous allons prochainement installer une bagagerie afin de permettre de ranger les affaires dont elles ne se servent pas au quotidien et ainsi désengorger les chambres. D’une manière générale, chacun respecte l’autre, s’organise en fonction des emplois du temps des uns et des autres. Par exemple, nous n’avons pas eu besoin de mettre en place un planning pour la cuisine; les femmes y vont à tour de rôle. De même, les familles s’entraident au niveau du linge.
Avez-vous d’autres projets du même type en perspective ?
Oui. Nous venons de racheter un hôtel aux Lilas, et envisageons un autre achat, dont nous devons discuter avec le SSP. La normalisation de ce secteur donne aujourd’hui des atouts pour obtenir des financements de la part des banques. Celles-ci ont encore une mauvaise image de l’hôtellerie sociale et sont réticentes à s’engager dans des opérations qu’elles imaginent risquées, voire douteuses. Mais si le montage financier reste complexe, on a désormais des arguments permettant de faire la démonstration que le secteur change, qu’il se professionnalise.
Cette professionnalisation fait-elle émerger de nouveaux métiers ?
Oui, par exemple l’architecte avec lequel nous travaillons est en train de devenir un véritable spécialiste de la rénovation des hôtels sociaux. Les gardiens, également, ne sont plus là que pour assurer la sécurité. Ils assurent la tenue des espaces communs, gèrent les règles de vie, distribuent les jetons hebdomadaires pour la laverie, font du reporting, etc. Pour opérer cette montée en compétences, nous organisons des sessions de formation communes entre hôtels.
Cette montée en gamme est-elle compatible avec la rentabilité des investissements ?
Lorsqu’on entre sur ce secteur, il faut voir sur le long terme. La rentabilité de l’investissement est à dix ou quinze ans. C’est bien pour cela que l’on peut parler de professionnalisation également. Les banques qui nous suivent l’ont bien compris.