Le Samusocial de Paris participe à la 3ème Nuit de la Solidarité | Samusocial de Paris
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Le Samusocial de Paris participe à la 3ème Nuit de la Solidarité

31 Jan 2020 • Reportage

Dans la nuit du 30 au 31 janvier, une cinquantaine de professionnels du Samusocial de Paris a participé à la 3ème édition de la Nuit de la Solidarité, aux côtés de quelque 2 000 bénévoles. Une opération de recensement des personnes à la rue pilotée par la Ville de Paris pour mieux comprendre leurs besoins et adapter la réponse des pouvoirs publics. Reportage dans le 1er arrondissement de Paris.  

20h. Préparatifs
Les responsables d’équipe et les bénévoles se retrouvent à la mairie pour assister à une présentation de l’opération. Chacun se voit remettre un sac, dans lequel se trouvent trois types de questionnaires anonymes selon le public rencontré : des personnes isolées, des couples ou des familles, et des groupes de 5 personnes ou plus. Un dossard bleu nuit sur les épaules, Yohanna Andriamanisa est responsable de zone à la coordination des maraudes au Samusocial de Paris. Ce soir, elle sera responsable d’une équipe de volontaires au dossard bleu ciel : Arnaud et Virginie, qui ont déjà participé à la Nuit de la Solidarité l’année dernière, et Alexandre, un nouveau venu. « J’avais envie de découvrir un monde que je ne connais pas, celui des personnes sans-abri. C’est une bonne occasion d’y mettre un pied et de voir quelles seront les décisions politiques prises par la suite. Je suis Parisien, il faut bien comprendre ce qui se passe dans la capitale ! ».  

 

comptage sdf nuit de la solidarité

 

22h. En route
L’équipe doit sillonner les rues situées autour du Palais Royal. Carte en main, Yohanna donne le tempo. Sous les arcanes de la rue Rivoli, des personnes sont allongées sur le trottoir. La responsable s’arrête devant un homme d’une cinquantaine d’années, le salue et lui propose de répondre au questionnaire. Alexandre le remplit pendant qu’elle mène l’entretien. Au fil de la conversation, ils apprennent que l’homme, Anglais, vit depuis 13 ans à Paris. Il a entendu parler de la Nuit de la Solidarité à la radio et a suivi les résultats de l’opération l’année dernière. Il n’appelle pas le 115 de Paris, refuse d’aller dans les centres d’hébergement et n’a pas de suivi social. « Je ne veux pas être reconduit à la frontière », explique-t-il. Son état de santé ? « Plutôt bon, assure l’homme. Enfin, j’ai eu la galle ». Il ne mendie pas mais vit des dons des passants.
Pendant ce temps, Arnaud et Virginie discutent avec une autre personne sans solution d’hébergement. La bénévole prend des notes : « Je suis de nature réservée et j’ai du mal à poser des questions. J’ai peur de me faire envoyer promener. Pourtant, ces personnes me touchent et je suis contente de participer à cette opération ».  
L’équipe poursuit sa route. Certaines personnes dorment : pas question de les réveiller, même si un questionnaire doit être complété avec des éléments d’observation. D’autres refusent de répondre. Pierre*, la cinquantaine environ, se prête au jeu. Il a été expulsé de son logement « juste avant la Coupe du monde de foot en 2018 », précise-t-il. Après avoir épuisé ses économies en nuits d’hôtel, il se retrouve à la rue et dort dans le métro, puis dans la rue. « Les centres d’hébergement collectif n’ont pas bonne réputation, je n’y vais pas car j’ai peur qu’on me vole ». L’homme ajoute : « Je suis devenu un peu sauvage avec les associations, mais il a fallu que je rencontre un travailleur social pour pouvoir accéder à une bagagerie ». Ses besoins ? Il n’en mentionne pas vraiment, mis à part quelques produits d’hygiène.  En aparté, Yohanna remarque : « C’est intéressant de voir que la bagagerie peut être une porte d’entrée pour entamer un suivi social car les personnes doivent être orientées par un travailleur social pour en bénéficier ».
Toujours sous les arcanes, place du Palais Royal, un ancien éleveur de bovins raconte son histoire à Alexandre. Son discours manque de cohérence mais le bénévole parvient à compléter le questionnaire.
 

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23h30. Passage à vide
Le quatuor arrive devant la Comédie Française. Changement d’ambiance, la pièce est terminée et les spectateurs sortent du théâtre, joyeux. De rue en rue, personne à l’horizon. Yohanna explique pourquoi elle s’est portée volontaire pour participer à cette nuit : « En tant que responsable de zone à la coordination des maraudes, je reçois des signalements de personnes à la rue et les transmets à des équipes de maraude. Il me semble important d’avoir de l’expérience sur le terrain et d’entrer directement en contact avec les personnes sans-abri ». Elle nuance : « Le questionnaire à remplir est assez court, mais je suis surprise de voir qu’assez rapidement, on demande aux personnes comment elles se sont retrouvées dans cette situation. Ça peut couper court à la discussion ! ».  
Un peu plus loin, sous les arcanes du jardin du Palais Royal, un homme emmitouflé dans un sac de couchage refuse de répondre à l’équipe et lance : « Je suis le roi, j’ai des choses à faire ».

 

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12h15. Retour au QG d’arrondissement
 L’équipe a terminé sa ronde. Au total, 21 personnes ont été recensées. Fruit du hasard, Virginie était affectée à la même zone en 2019. Elle constate : « D’une année à l’autre, le nombre est resté stable puisqu’on avait comptabilisé 22 personnes. J’en ai même reconnues quelques-unes, rue de Rivoli ». Leur mission accomplie, chacun fait le point. « Je suis content, c’était beaucoup plus intéressant que l’hiver dernier où j’étais dans le XVIème arrondissement. On n’avait croisé personne ! », souligne Arnaud. Son collègue Alexandre constate : « On ne peut pas offrir aux personnes sans-abri quelque chose de parfait, mais en les écoutant, on sent que les maraudes et les associations font leur travail et c’est un peu rassurant. J’ai trouvé qu’elles avaient le contact facile et ça m’a défait de mes préjugés. J’ai aussi été étonné de voir qu’elles ne formulaient pas vraiment de besoin. Je pensais qu’elles demanderaient à manger, ou un hébergement. Ça me questionne : Se sont-elles accoutumées à cette vie-là ? ».
Chaque volontaire rentre chez soi, mais Yohanna doit retourner au QG d’arrondissement déposer l’ensemble des questionnaires. « Je m’interroge sur la suite des événements et des mesures qui vont être prises. C’est la 3ème édition mais je ne vois pas de changements majeurs. Certes, des places d’hébergement ont été créées, mais le nombre de sans-abri comptabilisés entre la 1ère et la 2ème Nuit de la Solidarité a augmenté… ».

*Le prénom a été modifié.

 

 

 

 


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