Dans la nuit du 22 novembre 1993, le Samusocial de Paris faisait sa première maraude en allant à la rencontre de ceux qui n’ont plus rien. Près de 25 ans plus tard, les équipes mobiles d’aide (EMA) sont toujours mobilisées 7 jours sur 7 pour venir en aide aux personnes à la rue.
21h : une dame est assise sur un banc avec ses affaires, la main bandée. Sandrine, infirmière, Steffie, travailleuse sociale vacataire, et Manu, chauffeur-accueillant, se dirigent vers elle. C’est le premier signalement transmis par leurs collègues du 115 de Paris. La femme indique vivre dans la rue depuis 4 mois. Elle a déjà un suivi social et médical, ainsi qu’un dossier déposé à l’OFII*. « On peut vous proposer une mise à l’abri pour cette nuit, dans un centre d’hébergement », lui annonce Sandrine. La femme accepte. Elle monte dans le camion, qui prend la direction d’un second signalement. Sur une chaise, un homme presque endormi. Le dialogue s’engage. L’équipe lui propose de venir se reposer dans un centre du Samusocial de Paris. L’homme, fatigué, se lève lentement pour rejoindre la dame dans le camion.
Tout le monde descend
Arrivées au centre situé à Montrouge, les personnes prises en charge peuvent prendre un repas ou une douche avant d’aller se coucher. Les maraudeurs croisent une autre équipe venue accompagner un homme en situation de handicap. Sandrine l’aide à se doucher. « En tant qu’infirmière, ce qui m’intéresse le plus, c’est le relationnel, explique-t-elle. Raccrocher quelqu’un qui ne veut plus d’aide et petit à petit, le ramener vers des dispositifs de droit commun. J’aime aussi les soins d’hygiène ; après la douche, les personnes retrouvent l’estime de soi ».
Jusqu’au bout de la nuit
A 23h, les places à disposition des 7 équipes de maraude pour les hommes isolés sont toutes pourvues. Mais le travail des équipes ne s’arrête pas pour autant. Le trio entame une maraude « pure ». « On va quadriller les rues en s’arrêtant à chaque fois qu’on repère un sans-abri. Là, on peut vraiment prendre le temps de discuter avec eux. C’est ce que je préfère dans mon métier », souligne Steffie.
Le trio repart dans les rues parisiennes, direction la Porte Dorée. Il s’arrête devant une femme sous un abribus. Les maraudeurs la connaissent bien. « On a mis du temps à créer du lien avec elle, raconte Sandrine. Elle est à la rue depuis un an, un hébergement à la nuitée ne l’intéresse pas et dès qu’on aborde la question du suivi social, elle s’énerve ». Mais la dame semble apprécier leur compagnie. Créer du lien, évaluer la situation sociale et sanitaire des personnes, répondre à certaines demandes, orienter, ouvrir un suivi… les autres missions des maraudeurs sont nombreuses. Le camion cessera sa tournée comme toutes les nuits, à 5h du matin.