On ne connait pas le parcours exact d'Inès*, ni comment elle est arrivée dans une Halte femmes parisienne au milieu des années 2010. On sait qu’elle est en France depuis 2002, a été aide à domicile chez une dame qui lui a permis d’assurer sa situation administrative, et a également été nounou pendant un temps. Puis, à mesure que les années défilent lorsqu’elle se raconte, son histoire devient plus floue et s’assombrit. On imagine une faille, un trauma, mais on n’en saura pas plus. Et les professionnel·les du social qui l’accompagnent respectent son silence.
Inès est résidente du LHSS (Lits Halte Soins Santé) Babinski depuis qu’il a ouvert en 2019. Elle était auparavant hébergée par le Samusocial de Paris dans une autre de ses structures. L’hébergement dans un LHSS lui permet d’être suivie et accompagnée dans un parcours de soins médico-psychologiques d’une part, mais aussi sur le plan social grâce au travail des animateurs·rices et des assistant·es sociaux·les. Un cadre nécessaire pour cette hyperactive qui croque les activités qu’on lui propose avec enthousiasme. Car, à Babinski, la culture et les loisirs ne manquent pas et, comme dans tous les centres d’hébergement du Samusocial de Paris, ils structurent le temps et font partie intégrante de l’accompagnement des personnes. Chaque semaine, un programme d’animations est déterminé par l’équipe d’animation en lien avec une bénévole de Cultures du Cœur.
Musée, cinéma, visites diverses, sport et activités manuelles, les personnes hébergées peuvent s’inscrire en avance et organiser leur temps, entre leurs rendez-vous de suivi et leur quotidien. Pour Inès, ce rituel est source d’équilibre, de stabilité. « Je ne rate pas les activités culturelles. C’est très important. Je demande toujours le programme et je m’organise pour n’en louper aucune. » Un moyen pour elle de s’enrichir et de créer du lien : « Avec les activités, j’apprends beaucoup. J’y participe tout le temps avec d’autres femmes du centre. Ça me change ! Mon portable est plein de photos avec toutes ces personnes. »
Pétanque, musée, cinéma, réparation de vélo ou travail du cuir… c’est surtout dans le potager de Babinski qu'Inès s’exprime pleinement. Chaque matin, dès 6h, elle se rend dans ce grand carré mis à disposition des personnes hébergées pour arroser les parterres, et, aidée par les professionnel·les, y fait pousser tomates, herbes aromatiques, poireaux et autres légumes, même si elle reconnaît qu’elle a encore beaucoup à apprendre en tant qu’apprentie jardinière. Quand elle parle, au milieu des plantations, on la sent sereine et lorsqu’on l’interroge sur ses nombreux loisirs, Inès répond : « l’arrivée à Babinski a changé beaucoup de choses pour moi. Je participe à toutes les activités. Ça me permet d’évoluer et d’avancer dans ma vie.»
*Son prénom a été changé pour préserver son anonymat.